lundi 3 mars 2014

L'interview de Céline Landressie


Bonjour et merci d’accepter de répondre à ces quelques questions
Tout le plaisir est pour moi :)

Comment as-tu commencé à écrire ? Qui te lisait au début ?
Commencer à écrire en général, ou commencer à écrire « Rose Morte » ? Si c’est « en général », eh bien, au risque de verser dans le cliché, il s’avère que j’ai écrit dès que j’en ai eu les capacités. De très courtes histoires, des scénettes, etc. Puis plus tard des nouvelles. Hélas, j’ai tout jeté ;) !
Concernant « Rose Morte », j’ai débuté le premier volume en 2008. Il m’aura fallu presque deux ans pour en venir à bout. La période durant laquelle se déroule l’intrigue ne m’étant pas familière, j’ai passé près de 6 mois le nez dans divers ouvrages pour parvenir à constituer un décor historiquement satisfaisant.
Au début de mes tâtonnements littéraires, personne ne me lisait. Je ne montrais rien, estimant que ce n’était pas à niveau. Puis lorsque j’ai débuté « Rose Morte », il me semblait que c’était correct, aussi ai-je osé demander l’opinion de mon époux.

Quel est ton genre favori ?
Le Fantastique, avec presque tous les sous-genres qu’il inclut à l’exception (et ça, cela va sembler curieux) de la littérature vampirique. Mes seules incursions en la matière se résumèrent à Bram Stocker (Dracula) et Anne Rice (Entretien avec un vampire), il y a très longtemps de cela. Il y eut aussi « Salem », de Stephen King. À part cela... je crois que c’est tout.
Je ne lis pas non plus d’Urban fantasy (ou de « Bit-lit », son cousin français). Que le récit verse davantage dans le fantastique ou davantage dans la fantasy, ce n’est pas un registre qui m’attire.

Quel est ton processus créatif ? Qu’arrive-t-il avant que tu ne t’asseyes à écrire ?
Une somme d’efforts variés pour parvenir à avoir du temps et du calme. Denrées rarissimes, qu’il me faut pourtant en grande quantité pour parvenir à me concentrer. Une fois en place, entourée de mes kilos de notes, de la documentation, de mon crayon de papier et de ma gomme, je commence à... réfléchir. Je dois à la fois penser et ressentir la scène pour pouvoir l’écrire. Atteindre cet équilibre est délicat. D’où la nécessité d’un calme absolu.

À quelle personne es-tu le plus à l’aise : à la première ou à la troisième personne ?
La troisième. En tant que lectrice, j’ai beaucoup de mal avec les récits à la première personne du singulier. L’effet supposément immersif est sur moi strictement inversé. Je ne m’identifie pas au personnage qui s’exprime, ni n’ai l’impression de converser avec lui. Son monologue narratif me laisse donc souvent de marbre.
Lorsqu’il a été question de prendre la plume, c’est tout naturellement que j’ai rédigé à la troisième personne. Un emploi qui n’empêche en rien de s’immiscer dans les pensées et les émotions des personnages, tout en permettant davantage de souplesse, à mon humble avis.

Quels écrivains admires-tu le plus ?
Stephen King est mon auteur favori, tous genres confondus. Son inventivité et son talent ne laisse jamais de m’impressionner. Je suis également admirative devant la prose à la fois érudite et dynamique de Simone Bertière, dont j’ai lu la quasi-totalité des œuvres. Mais, ma réponse serait incomplète si je ne mentionnais pas Jane Austen - dont j’adore le style et l’esprit -, ainsi qu’Agatha Christie.

Qu’est-ce qui rend crédible un personnage ? Comment crées-tu les tiens ?
Chacun voit midi à sa porte sur la question du traitement des personnages. Pour ma part, un personnage ne me semble crédible que s’il est psychologiquement travaillé, s’il est cohérent avec lui-même, ainsi qu’avec l’univers qui l’entoure. Sachant que le second point est fluctuant, puisque les variations d’humeur sont légions chez chacun de nous.
Je n’ai pas la sensation de « créer » mes personnages. Ils s’imposent tels qu’ils sont, avec leur passé, leur personnalité, leur psyché, leurs motivations. Ils évoluent en fonction de cela, ainsi que des choix qu’ils font, et des répercussions desdits choix. Que se passe-t-il dans les profondeurs de mon subconscient pour que ces personnages m’apparaissent déjà construits, je ne saurais le dire !

Au plus profond de ta motivation, pour qui écris-tu ?
J’écris d’abord pour moi. Il faut toujours écrire pour soi en premier lieu, car si l’on écrit pour satisfaire les désidératas des autres, alors non seulement on met en péril son identité littéraire, mais on risque de niveler le récit de peur qu’il déplaise à untel ou untel. Si l’on se met à ajouter telle chose parce que c’est tendance, ou à enlever telle autre parce que ça pourrait ne pas être accepté, on n’est plus dans l’écriture, on est dans la création d’un produit marketing. Or, il me semble qu’il faut écrire selon ses convictions, son cœur, pour que l’histoire que l’on narre ait quelque chose d’unique à proposer.
Dans un second temps - très proche du premier -, j’écris pour quiconque voudra bien entrer dans ces rêveries et s’y perdre avec moi. Je m’efforce de procurer enchantement et émotions, mais aussi de communiquer quelque chose en plus. En l’occurrence, une certaine vision des relations humaines, de leur densité, de leur grande complexité, et de leur importance...

Les avis (négatifs ou positifs) des lecteurs te servent-ils ?
Écrire est un processus long et difficile, qui demande un investissement énorme. Aussi, il est toujours extrêmement motivant de voir l’enthousiasme des lecteurs, leur ferveur, leur engouement, de recevoir leurs encouragements. Cela véhicule une énergie positive précieuse et enrichissante. Car l’on apprend beaucoup sur la personnalité d’un lecteur en entendant ce qu’il a préféré, quel personnage il aime, comment il le perçoit, ce qu’il déduit de certains éléments, etc. C’est très intéressant, et utile :)
La question des avis négatifs serait, je pense, un peu fastidieuse à aborder dans le détail. Il faudrait commencer par souligner la différence entre l’opinion, subjective par essence (c’est naturel, nous sommes tous subjectifs), la « remarque » objective à vertu d’amélioration, et la « critique » formulée sans délicatesse puisque n’ayant pour but que de blesser. Ensuite, il faudrait parler des différents types de comportements à l’origine des « critiques ». Comme par exemple ceux qui n’ont pas suivi mais qui s’expriment pour se donner une contenance, ou les jaloux qui raillent pour se sentir moins désorientés, ou encore ceux qui considèrent la critique - fondée ou non - comme étant la seule forme d’avis audible, pensant sans doute démontrer par là une pseudo-intellectualité... Il y aurait beaucoup de catégories à inventorier. Et pas des plus indispensables... Les opinions sont majoritaires, évidemment. Viennent ensuite les critiques, puis enfin les remarques.
On ne peut pas plaire à tous, et c’est très bien ainsi. Le monde est riche d’une multitude de personnalité. Uniformiser les goûts serait désastreux. Néanmoins, quiconque aurait envie de se lancer dans l’écriture autrement qu’en termes de hobby doit savoir qu’il risque de prendre des coups. Les Bisounours, c’est la porte à côté. Ici, c’est le règne des Gremlins.
J’entends parfois dire qu’il faut « savoir mettre son égo dans sa poche » lorsque l’on exerce une activité artistique. Il y a du vrai. J’aimerais seulement que ce précepte soit appliqué autant par celui qui reçoit la critique que par celui qui la profère. Car égratigner la sensibilité d’autrui sous prétexte d’étaler sa science n’est pas une preuve d’intelligence. Au contraire.
Pour en revenir à la question initiale, j’estime être sur ce point aussi heureuse que chanceuse, puisqu’au cours de cette aventure littéraire j’ai rencontré - et rencontre encore - pléthore de personnes charmantes. De ce fait, j’ai eu nombre d’échanges chaleureux et enthousiasmants. Le contact avec les lecteurs, ainsi qu’avec leurs avis, est donc pour moi une bonne expérience :)

Partages-tu tes projets d’écriture avec une personne de confiance afin d’avoir son opinion ?
Je ne discute avec personne du projet, ou du scénario. Il me revient de résoudre les questions du « comment », du « quand », du « qui » et du « pourquoi ». Je ne pourrais pas fonctionner autrement. Je sais où je veux aller. Par conséquent, je n’éprouve pas le besoin que l’on valide mes choix. Il m’est bien arrivé de divulguer une information relative à la saga, mais dans le cadre d’une conversation, pas dans l’attente d’une opinion.
Durant la phase d’écriture, j’ai des « beta-lecteurs ». Ils sont deux, lisant au fil de l’eau par tranche de deux chapitres. Grâce à leurs réactions et leurs commentaires (sur lesquels je ne rebondis jamais : il ne faut pas les spoiler !), je détermine si l’émotion/explication/ambiance voulue est passée correctement.
Ensuite, lorsque le livre est achevé, d’autres lecteurs « fétiches » lisent en avant-première.

T’imposes-tu une discipline, en termes de calendrier, d’objectifs etc. ?
J’essaye, oui, car l’on est supposé tenir ses délais. Mais la vie étant ce qu’elle est, les embûches peuvent parfois s’en mêler et bouleverser complètement vos plans. Or, la créativité, c’est une chose fragile. Quand les choses se gâtent, non seulement le processus créatif s’en ressent, mais on se surajoute du stress si l’on commence à se matraquer l’esprit avec les deadlines. Ce qui, au final, empire la situation.
Toutefois, je me lève tous les matins en escomptant abattre une certaine quantité de travail, et en mettant tout en œuvre au cours de la journée pour y parvenir. J’ai horreur que cela piétine ! D’où l’immense frustration que j’ai pu éprouver au cours de l’année et demi écoulée...

De quoi t’entoures-tu quand tu écris pour favoriser ta concentration ?
De solitude et de silence. Ou alors de musiques précises, en fonction de l’ambiance dans laquelle je dois me plonger.

Écris-tu sur écran, imprimes-tu souvent, corriges-tu sur papier...? Quel processus suis-tu ?
J’écris sur écran, oui. J’imprime tous les deux chapitres, et relis/modifie sur le papier... Puis je reprends la correction, et relis/modifie une seconde fois. Après quoi j’écris les deux chapitres suivant, que j’imprime lorsqu’ils sont terminés, et le processus de relecture/correction reprend, deux fois également. Finalement, lorsque le livre est achevé, j’imprime de nouveau à compter du début (deux chapitres par deux chapitres) et recommence exactement le même processus. Ainsi, en moyenne, lorsque le livre est terminé et relu entièrement, chaque chapitre a été revu/modifié 4 fois.
En général, je recommence une troisième, voire une quatrième fois. Ce qui porte à 6 ou 8 le nombre de corrections :O.
Je suis très intransigeante avec moi-même. Mes proches me taxent volontiers de perfectionnisme. C’est vrai. Je travaille énormément le texte. Durant la phase d’écriture, il m’arrive de rester bloquer plusieurs heures (voire plusieurs jours), faute de réussir à trouver la tournure de phrase, ou le mot, qui corresponde exactement à ce que je veux exprimer. C’est épuisant, mais le jeu en vaut la chandelle :)

Quelle a été ton expérience avec les maisons d’édition ?
Avant d’être contactée par les éditions de l’Homme Sans Nom, j’avais démarché une quinzaine de maisons d’éditions, partant des plus « grandes » et descendant en taille au fur et à mesure.
J’ai eu la chance de trouver un éditeur aussi vite, alors que je m’étais préparée à devoir chercher looooongtemps !
Le destin a très bien fait les choses, en tout cas :)

Sur quel projet travailles-tu en ce moment ?
Sur « Flétrissures », le troisième tome de « Rose Morte ». Pour des raisons échappant totalement à ma volonté, j’ai pris beaucoup de retard sur ce tome. Je dois dire que cela m’agace prodigieusement. Je suis en perpétuelle quête de temps pour travailler. Or, on ne peut pas dire que la providence soit clémente à ce niveau... Mais je m’acharne ;)

Le dernier mot est pour toi…
La seule chose qui me vienne à l’esprit lorsque je puis m’exprimer sur le sujet de mon choix, ce sont les lecteurs. Merci, merci, et encore merci à tous ceux et celles qui ont bien voulu donner sa chance à ces ouvrages. C’est très précieux ! Cela, je ne le répèterai jamais assez.
Merci aussi à toi, Virginie, pour m’avoir proposé cette interview. C’était un plaisir d’y répondre :)

Merci de t’être livrée à moi et aux lecteurs (acquis ou en devenir)

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